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Affaires françaises

Affaire des "disparus de Mirepoix": le meurtre violent d'un père et de sa fille devant les assises

Christophe Orsaz, 46 ans, et sa fille Célia, 18 ans, n’ont plus donné signe de vie depuis le 30 novembre.

Christophe Orsaz, 46 ans, et sa fille Célia, 18 ans, n’ont plus donné signe de vie depuis le 30 novembre. - Capture Twitter @liladpl

Marie-José M. et son complice Jean-Paul V. sont jugés à Foix (Ariège) à partir de ce vendredi. La première est accusée d'avoir orchestré l'assassinat de son ancien compagnon et de sa belle-fille.

Des "disparus de Mirepoix", l'affaire n'a aujourd'hui plus que le nom. Car les "disparus", Christophe et Célia Orsaz, ont été retrouvés morts en juin 2018, soit plus de six mois après le début de l'enquête, en novembre 2017.

Quasiment six ans jour pour jour après les faits, le procès de leurs meurtriers présumés, Marie-José M. et Jean-Paul V., s'ouvre ce vendredi à Foix, en Ariège. L'infirmière et son complice sont accusés d'avoir fomenté un plan pour se débarrasser du père et de sa fille dans des circonstances ultra-violentes, sur fond de vengeance amoureuse.

Depuis son placement en garde à vue, Marie-José M. - que les enquêteurs considèrent comme le cerveau des opérations - s'est "arc-boutée dans une position de déni en contestant toute intention criminelle", estime Me Arnaud Lévy-Soussan, avocat des familles des victimes. Mais ces dernières, loin d'être "résignées", entendent bien comprendre précisément le contexte dans lequel les deux victimes ont été tuées.

"Ils ont l'espoir d'obtenir la vérité, plusieurs années après les faits. Ils aimeraient comprendre la relation qui s'est nouée entre les deux accusés pour en arriver là", ajoute l'avocat auprès de RMC Crime.

Une double disparition inquiétante

Début décembre 2017, alors que l'actualité nationale est bousculée par la mort de Jean d'Ormesson, des médias locaux commencent à consacrer des articles à une inexplicable disparition. Dans l'Ariège, un père et sa fille se sont mystérieusement volatilisés depuis quelques jours. Élément particulièrement inquiétant: seule leur voiture a été retrouvée, incendiée, dans le département voisin de l'Aude.

Dans la presse, quelques détails fuitent à propos des deux disparus. Célia Orsaz, 18 ans, fait ses études à Toulouse. Le 30 novembre, alors qu'elle devait justement reprendre le train vers la "Ville rose" après avoir rendu visite à son père Christophe, un paysagiste de 46 ans installé à Mirepoix depuis quelques années, elle n'est jamais parvenue à la gare.

Le parquet de Foix ouvre alors une enquête pour "disparition inquiétante" et les gendarmes de la Section de recherches de Toulouse sont chargés des investigations. Des dizaines d'enquêteurs se lancent dans des recherches compliquées par une météo à certains moments peu clémente.

Deux suspects arrêtés

Les appels à témoin semblent infructueux, tout comme les premières battues. Mais en creusant dans le passé des disparus, les enquêteurs auront plus de chance. Ils commencent à s'intéresser à une certaine Marie-José M., avec qui Christophe Orsaz avait rompu quelques mois auparavant. Le comportement de cette infirmière interpelle les gendarmes: elle semble ne jamais avoir réellement accepté la séparation. Le paysagiste avait par ailleurs déposé plusieurs plaintes à son encontre, se disant victime de harcèlement et de menaces depuis leur rupture.

L'enquête s'accélère le 11 juin 2018. Les enquêteurs procèdent à l'interpellation de Marie-José M., mais aussi d'un mécanicien âgé de 48 ans, Jean-Paul V. Ils soupçonnent le duo criminel d'avoir planifié l'assassinat du père et de la fille sur fond de vengeance amoureuse et de chantage sexuel, relatait à l'époque Le Parisien.

Les deux suspects sont placés en garde à vue. C'est le mécanicien qui craquera le premier: aux enquêteurs, Jean-Paul V. livre le récit très circonstancié d'un plan machiavélique pour exécuter Christophe Orsaz.

Un guet-apens mortel

Le jour des faits, Christophe Orsaz reçoit un appel passé depuis un numéro prépayé. Au bout du fil, un interlocuteur inconnu lui demande de le rencontrer dans le cadre d'une mission pour son travail, relatait récemment Marianne. Le paysagiste accepte. Il propose à sa fille, qui doit rejoindre Toulouse, de la déposer en voiture à la gare juste après ce rendez-vous professionnel, dans la commune de Bélesta. La jeune fille accepte donc d'accompagner son père.

En arrivant à l'endroit indiqué, le père et la fille découvrent une ferme laissée à l'abandon, à l'écart de tout. C'est lorsque le premier sort de sa voiture qu'il tombe dans un guet-apens mortel. Marie-José M. et Jean-Paul V. fondent sur lui et lui assènent des coups de barre de fer avant de l'entraîner dans une fosse sceptique. Là, il mourra asphyxié par les excréments, détaillent encore nos confrères.

Célia, qui a assisté à toute la scène, constitue alors un témoin à éliminer. Elle sera conduite par les deux assaillants dans un bois dans l'Aude, puis abattue d'une balle dans la tête, victime collatérale du massacre.

Au cours de son récit, Jean-Paul V. indique aussi l'emplacement où il a déposé les corps des deux victimes. En se rendant aux endroits mentionnés, les enquêteurs retrouveront effectivement les restes de Célia et Christophe Orsaz.

Marie-José M., cerveau du double assassinat?

Au gré de plusieurs témoignages et expertises recueillis durant l'instruction, Marie-José M. est décrite comme une femme manipulatrice, accro aux sites de rencontre. Certains la décrivent comme "séductrice" mais "glaciale", beaucoup soulignent son charisme et son intelligence, rapportait un article de la Dépêche du Midi en 2018.

Jean-Claude V. s'est-il seulement laissé manipuler par sa compagne, comme il l'affirme? Et quel rôle a réellement joué cette dernière dans la planification de l'attaque? Des questions que se posent toujours les parties civiles. Alors qu'elles vont être confrontées pour la première fois aux accusés, elles espèrent que la principale accusée sera bien condamnée pour "assassinat", même si elle soutient n'avoir jamais souhaité la mort de son ancien amant.

En mai dernier, Marie-José M. comparaissait devant la justice une première fois sur le volet du harcèlement dont l'accusait Christophe Orsaz avant sa mort. Pour ces faits, elle avait écopé de six mois d'emprisonnement. Pour ce nouveau procès, elle et son complice encourent la réclusion criminelle à perpétuité. Contactée, sa défense n'a pas souhaité répondre à nos questions.

Elisa Fernandez