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Faites entrer l'accusé: le combat de Marie-Rose pour rendre justice à sa fille

Marie-Rose, la mère de Christelle Blétry, ce vendredi lors d'une conférence de presse.

Marie-Rose, la mère de Christelle Blétry, ce vendredi lors d'une conférence de presse. - Thierry Zoccolan - AFP

Retrouvez ce dimanche, l’émission phare Faites entrer l’accusé sur RMC Story. Cette semaine, Dominique Rizet revient sur le combat de Marie-Rose pour élucider la mort de sa fille.

Son combat a duré plus de 20 ans. Le 28 décembre 1996, au petit matin, dans la commune de Blanzy, la famille Blétry s’inquiète de ne pas voir leur fille, Christelle, dans son lit. Sa mère, Marie-Rose sent tout de suite que ce n’est pas normal et que quelque chose ne va pas. La veille, la jeune fille de 20 ans devait passer la soirée chez des amis.

Cette histoire, c'est celle d'un long combat. Faites entrer l'accusé revient sur le parcours de Marie-Rose pour élucider la mort de sa fille. Retrouvez cette émission ce dimanche sur RMC Story à 21h05

Après cette soirée, la mère de famille décide d'interroger les proches de sa fille. “Ses amis m’ont dit que Christelle était partie aux environs de minuit et qu’ils ne l’avaient pas revu” explique Marie-Rose.

Sans attendre, elle prévient le commissariat de Montceau-les-Mines. Mais elle va être confrontée à un officier qui ne prend pas sa déposition au sérieux et lui fait comprendre que sa fille est majeure et donc libre de disparaître. Pourtant, la mère est convaincue qu’il est arrivé quelque chose à Christelle. Elle n’a pas d’autres solutions que d’insister auprès des policiers. Mais n’étant pas pressé de la recevoir, les agents la font patienter longuement dans le hall d’accueil. Et c’est à ce moment-là, que Marie-Rose entend des informations arriver au commissariat.

“On entendait dans les radios ‘jeune fille retrouvée dans le fossé’, mais je ne voulais pas croire qu’on parlait de Christelle.” confie la maman, désemparée.

Pendant ce temps, une équipe de police est envoyée vers un chemin isolé, dans le lieu-dit de L’étang d’Ocle. Dans la matinée, c’est un facteur qui a découvert le corps d’une femme et a prévenu les forces de l’ordre. “Sur elle, on retrouve son sac avec ses papiers d’identité, ce qui permet de confirmer l’identité de Christelle Blétry”, raconte le commandant Bourdin, de la police judiciaire de Dijon.

En découvrant le corps de la jeune femme, les policiers savent qu’ils ont affaire à un crime d’une rare violence. Mais aucun élément matériel ne permet de mettre les enquêteurs sur une piste. Le corps de la victime est donc envoyé à l’hôpital de Montceau-les-Mines pour autopsie. Au même moment, un policier envoie Marie-Rose à ce même hôpital, sans lui en expliquer la raison. “Je ne comprends pas, personne ne nous dit rien, personne ne sait rien”, s’agace la mère de famille. En arrivant, le médecin lui fait comprendre que Christelle est morte.

Et ce n’est que le lendemain qu’elle apprendra que sa fille est décédée de 123 coups de couteau, en lisant le journal.

Le corps de Christelle Blétry, 20 ans, avait été retrouvé lardé de 123 coups de couteau à Blanzy, en Saône-et-Loire, en décembre 1996.
Le corps de Christelle Blétry, 20 ans, avait été retrouvé lardé de 123 coups de couteau à Blanzy, en Saône-et-Loire, en décembre 1996. © AFP

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Une mauvaise piste

Pour comprendre ce qui a bien pu arriver à la jeune femme, les enquêteurs reviennent sur la dernière fois où elle a été vu vivante. Après avoir passé la soirée chez des amis, Christelle et deux copains décident de rentrer. Vers minuit et quart, elle part de son côté, seule, à pied. Et après, plus rien. “Christelle ne faisait pas de stop, elle ne serait jamais montée dans la voiture d’un inconnu, par contre elle était serviable donc elle aurait pu se faire piéger", raconte sa mère. Mais des éléments vont venir montrer qu’avant sa mort, la jeune femme était inquiète et renfermée.

“On nous a dit qu’elle était soucieuse et qu’elle avait l’impression d’être suivie”, raconte le commissaire Schwendener, de la police judiciaire de Dijon.

Dix jours avant le meurtre de Christelle, elle aurait écrit une lettre à sa meilleure amie qui va soulever des interrogations du côté des enquêteurs. Dedans, elle parle d’une brève relation avec un homme, Christophe, qui lui aurait proposé de vendre de la drogue et d’avoir une relation sexuelle à trois. Après avoir refusé, l’homme aurait sorti un couteau et lui aurait posé sur la gorge en la menaçant de l'égorger. Pour les enquêteurs, il n’y a plus de doute possible, ils sont sur la bonne piste. L’homme est alors interrogé, mais finalement relâché, car il avait un alibi ce soir-là. Il a fait la fête avec des amis dans une chambre d’hôtel avant de prolonger la soirée en boîte de nuit.

Mais les années passent, et aucune piste n’est probante. Après avoir remué ciel et terre pour que la justice ne classe pas le dossier, Marie-Rose demande à ce que les vêtements de sa fille placés sous scellé soient analysés. Et contre toute attente, 17 ans après la mort de la jeune fille, un ADN masculin est retrouvé sur plusieurs de ces vêtements. Il est retrouvé dans des traces de sperme présent sur les sous-vêtements de Christelle. Pour la mère de la victime, c’est un nouveau coup dur, car elle apprend que sa fille a été violée.

Des aveux 18 ans plus tard

La juge envoie le résultat ADN au fichier national automatisé des empreintes génétiques. Et cette fois-ci, ça match. L’ADN est déjà connu du fichier. Il s’agit de Pascal Jardin, un homme de 54 ans. Les enquêteurs découvrent qu’à l’époque, il vivait à seulement 2 kilomètres du domicile de Christelle. Ils décident donc de l’interpeller. Le 9 septembre 2014, à 6 heures du matin, Pascal Jardin est interpellé et place en garde à vue. Mais l’homme ne semble pas surpris par cette arrestation. Pourtant, il nie toute implication dans le meurtre de Christelle Blétry.

Après plusieurs heures d’interrogatoire et face aux éléments qui l'incriminent, il va finir par avouer. “J’ai croisé cette fille que je ne connaissais pas, je l’ai obligée à monter en la tirant par son sac. Et puis elle est montée. Je pense qu’elle a compris ce que je voulais” avoue finalement Pascal Jardin. L’homme la conduit ensuite dans le chemin de l’Etang d’Ocle, où il la force à avoir un rapport sexuel avec lui. Ensuite, quand ils se rhabillent, Christelle aurait profité d’une baisse d’attention de son prédateur pour prendre la fuite en courant.

“Là, j’ai sorti mon couteau qui était dans la voiture et je lui ai couru après. Et elle s’est tellement mise à paniquer que j’ai paniqué aussi et puis c’était pas moi”, avoue Pascal. “Elle était très apeurée, et moi, j’étais dans un état second. Je suis incapable de vous dire où j’ai donné le premier coup de couteau. Elle criait”.

Quand les cris ont fini par cesser, l’homme retourne à son véhicule calmement comme si rien ne s’était passé. En rentrant chez lui à 2 heures du matin, il se prépare un sandwich, le mange, et va se coucher près de sa femme. Puis, il reprend le cours de sa vie et garde son secret pendant 18 ans.

Pascal Jardin est donc mis en examen pour le meurtre et le viol de la jeune Christelle. Pour Marie-Rose, c’est un soulagement. La justice va enfin pouvoir condamner le meurtrier de sa fille.

Que justice soit faite pour Christelle

En janvier 2017, Pascal Jardin comparaît devant la cour d’assises de Saône-et-Loire. Mais sa version lors de son procès a changé depuis la garde à vue. Il raconte désormais que le rapport sexuel qu’il a eu avec Christelle Blétry était consenti et nie totalement le meurtre. Les jurés ne croient pas en cette version et le condamnent à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie de 20 ans de sûreté. L’homme fait immédiatement appel de sa décision.

Il est donc rejugé devant la cour d’assises d’appel de Dijon, le 20 septembre 2018, soit 22 ans après le meurtre de la jeune femme. Pour Marie-Rose, ce procès en appel est une épreuve supplémentaire à affronter. Elle reste déterminée pour que justice soit faite. Pourtant, Pascal Jardin continue de nier son implication. Et c’est son propre fils, Mickaël Jardin, qui est convaincu de sa culpabilité qui va tenter de le faire avouer.

“Ma démarche c’était de lui dire ‘vas-y balance, crache, c’est pas trop tard, c’est justement là que tu joues le plus gros’, mais il me jurait toujours droit dans les yeux qu’il avait rien fait”, raconte son fils.

A l’issue de l’audience, la première condamnation de Pascal Jardin est confirmée en appel.

Retrouvez Faites entrer l'accusé ce dimanche à 21h05 sur RMC Story et en replay sur notre plateforme RMC BFM Play.

Alix Mancel