Affaire Mis et Thiennot: la justice demande un procès en révision pour les deux chasseurs

Raymond Mis (g) et Gabriel Thiennot (d), le 14 juin 1988, près de l'étang de Brenne où fut retrouvé le corps du garde-chasse Boistard en 1946 pour l'assassinat duquel ils furent à l'époque inculpés et condamnés - FRANK PERRY / AFP
"Une décision historique". La commission d'instruction a décidé ce jeudi de renvoyer vers la Cour de révision le dossier de Raymond Mis et Gabriel Thiennot, 73 ans après leur condamnation pour le meurtre d'un garde-chasse en 1946, nous confirme Me Pierre-Emmanuel Blard, l'un des avocats des familles des deux hommes, aujourd'hui décédés. Selon nos informations, un nouveau procès devrait se tenir courant 2024.
"C'est une décision historique. La Cour de révision a demandé un nouveau procès à la fois pour Raymond Mis et Gabriel Thiennot, comme nous l'avions demandé", commente encore l'avocat.
Selon les mots de son conseil, contacté par RMC Crime ce jeudi, le fils de Gabriel Thiennot, qui est venu accueillir cette décision accompagné d'une cinquantaine de membres du comité de soutien Mis et Thiennot, s'est laissé submerger par l'émotion.
"C'est bon!", s'est exclamé, en larmes, Thierry Thiennot. "On n'est plus qu'à une marche de la victoire."
Des aveux obtenus sous la torture
Il s'agissait de la septième demande en révision formulée par les proches de deux chasseurs depuis le début de l'affaire, en 1946. En décembre, cette année-là, un garde-chasse, Louis Boistard, est retrouvé mort dans un étang de Mézières-en-Brenne, dans l'Indre, tué par quatre balles. Dès le départ, les enquêteurs se tournent vers un groupe de chasseurs.
Parmi eux se trouvent Raymond Mis et Gabriel Thiennot, tous deux âgés de 19 ans. Un témoin rapporte les avoir entendus se disputer plus tôt dans la journée avec le garde-chasse. Ils sont placés en garde à vue et après un interrogatoire qui durera neuf jours, les chasseurs finissent par avouer le meurtre.
Ils se rétractent finalement, déclarant avoir été torturés par les policiers en échange d'aveux. Ils seront condamnés à trois reprises, mais toute leur vie durant, ils ne cesseront de clamer leur innocence dans ce dossier.
"Ce n'est qu'une première victoire"
Dès 1980, ils sont rejoints dans leur combat par Léandre Boizeau, une de leurs connaissances, qui décide de fonder un comité de soutien en leur nom. Fort encore aujourd'hui de nombreux membres, dont les enfants des deux chasseurs, morts en 2003 et 2009, le comité a toujours poursuivi le combat de Raymond Mis et Gabriel Thiennot, luttant pour obtenir un procès en révision.
C'est désormais chose faite, notamment grâce à une modification récente de la législation, selon laquelle tout procès fondé sur des aveux obtenus sous la torture peut être révisé. Un texte écrit presque sur-mesure pour cette affaire.
"Ils savent que ce n'est qu'une première victoire, et que la vraie bataille se tiendra l'année prochaine", au moment du procès en révision, ajoute Me Pierre-Emmanuel Blard.