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Corruption de mineure: 3 ans de prison pour le chanteur d’Il était une fois

Le tribunal de Meaux (Seine-et-Marne)

Le tribunal de Meaux (Seine-et-Marne) - Google Street View

Jugé ce lundi à Meaux (Seine-et-Marne) après avoir été piégé par un gendarme se faisant passer pour une petite fille de 13 ans, Richard Dewitte, 77 ans, a écopé de 3 ans de réclusion criminelle.

"De toute ma vie, je n’ai jamais touché une mineure." Jugé par le tribunal correctionnel de Meaux, en Seine-et-Marne, pour "corruption de mineure" et "propositions sexuelles faites à une mineure de moins de 15 ans par voie électronique et suivies de rencontre", Richard Dewitte a été condamné à 3 ans de réclusion ce lundi.

T-shirt gris et épaules voûtées, l’interprète du titre J’ai encore rêvé d’elle dans les années 1970, membre du groupe Il était une fois, s’agrippe au rebord du box des prévenus et secoue la tête lors de la lecture de certains messages envoyés à "Camille", une utilisatrice de 13 ans avec laquelle il a échangé en mars dernier sur le site Coco.fr, sans savoir qu’il s’adressait en réalité à un gendarme dissimulé sous un faux profil.

"Je t’apprendrai à faire des smacks. Avec la langue, c’est mieux. Je serai ton professeur de sexe", écrit-il alors, pensant s’adresser à une jeune fille.

Au cours de leur discussion, "Camille" lui rappelle qu’elle n’a que 13 ans. "Au contraire, j’aime trop ton âge", répond-il. Il lui confie sa peur de se faire repérer par la police et lui dit de ne pas en parler. Mais il lui répète à l’envi que la différence d’âge n’empêche pas l’amour entre deux personnes.

"Je ne lui aurais pas fait de mal"

Et le chanteur ne s’en tient pas là. Entre le 25 et le 28 mars, après avoir échangé de nombreux messages avec elle, certains à caractère sexuel, il lui propose finalement de la rencontrer. Rendez-vous est pris pour le 30 mars, sur le parking d’un supermarché à Croissy-Beaubourg, à une heure de voiture de chez lui.

À l’arrivée, pas de "Camille" en vue, mais une équipe de la Section de recherches de Paris qui vient lui passer les menottes alors qu’il attend à bord de son véhicule. En garde à vue, il reconnaît la plupart des faits et se plaint d’avoir été "piégé". Il ressort libre et rentre chez lui. Il faudra attendre le 22 août pour qu’il soit à nouveau convoqué par les enquêteurs, puis placé en détention provisoire.

"Je voulais voir si elle existait vraiment. Mais je ne lui aurais pas fait de mal, on aurait mangé quelque chose, on serait allés se balader. Ce n'était que des écrits. Je ne suis pas Marc Dutroux", affirme-t-il ce lundi depuis le box, interrogé sur ses motivations en se rendant à Croissy-Beaubourg.

Une précédente condamnation en 2015

Si la question de ses intentions se pose, c'est parce que le chanteur a déjà été condamné à plusieurs reprises, notamment à 18 mois de prison avec sursis en 2015, à Dijon (Côte d’Or), pour des faits globalement similaires: alors qu’il pense parler sur Internet à une jeune mineure, c'est en réalité un gendarme qui, sous un faux profil, lui a donné rendez-vous.

Inlassablement, parce que les faits sont quasiment les mêmes, cette affaire est ramenée sur la table ce lundi. "C’est la même procédure en 2015 et en 2023. Mais jamais il ne prend ses responsabilités", déplore l’avocat général. Dans la bouche du prévenu, la même excuse revient en boucle: "C’était du virtuel. J’étais complètement stupide, pour moi c’était comme un jeu."

"Est-ce qu’elles existaient vraiment? J’avais l’impression de dialoguer avec des fantômes, des gens qui n’existaient pas", poursuit-il, évoquant également ses précédentes condamnations.

"Tout le monde va m’oublier"

À l'audience, selon la personne qui s’adresse à lui, Richard Dewitte change de réponse, se contredit dans ses explications. "Il a un petit problème de discernement", commente son avocat, Me Stéphane Loisy, appelé à la barre à son tour. "Monsieur Dewitte est lui-même son pire ennemi", poursuit-il, s’appuyant sur les discussions sans queue ni tête de son client avec "Camille".

"Il dit qu’il veut être son professeur de sexe, puis il lui dit qu’il sait faire des poissons panés. Il a suivi un traitement, ce traitement n’est pas efficace. Il faut qu’il soit sous curatelle", conclut-il en demandant au parquet une certaine tolérance.

Quant au chanteur, il en est persuadé: cette affaire marque la fin de sa carrière. "Tous les gens qui croyaient en moi vont me rouler dans la boue, je m’y attends. Je vais sombrer, tout le monde va m’oublier, c’est comme ça", regrette-t-il. "Des personnalités [accusées de corruption sur mineurs, NDLR] qui continuent leur carrière, il y en a. Morandini, pour ne pas le citer…", tance le procureur général, visiblement peu convaincu par ses atermoiements.

Conformément aux réquisitions de ce dernier, Richard Dewitte a finalement été condamné ce lundi à 3 ans de réclusion criminelle avec obligation de suivi socio-judiciaire et une injonction de soins. Il doit par ailleurs reverser 4620 euros de dédommagements à l’association Innocence en danger.

Elisa Fernandez