RMC Crime
Cold Cases

Deux acquittements et 21 ans plus tard, le meurtre de Mika Kusama reste un mystère

C'est sur l'île des Pins en Nouvelle-Calédonie que la jeune touriste japonaise Mika Kusama a été retrouvée morte en 2002.

C'est sur l'île des Pins en Nouvelle-Calédonie que la jeune touriste japonaise Mika Kusama a été retrouvée morte en 2002. - Theo Rouby / AFP

La jeune Japonaise était partie en voyage en Nouvelle-Calédonie. Son corps avait été découvert cinq jours après sa disparition, partiellement calciné, dans un sanctuaire interdit à la visite.

Un décor paradisiaque pour un crime d'une grande violence, toujours non résolu. Près de 21 ans après le meurtre de Mika Kusama, dont le corps a été retrouvé en partie calciné en mai 2002, sur l'île des Pins, en Nouvelle-Calédonie, on ne sait toujours pas dans quelles conditions la jeune touriste japonaise a été tuée.

Alors que deux personnes ont été jugées, soupçonnées de l'avoir tuée parce qu'elle aurait profané des lieux sacrés, leur procès s'est soldé par un double acquittement, laissant le mystère planer autour du dossier.

Le 2 mai 2002 au matin, la jeune femme de 29 ans quitte le gîte où elle loge pour ses vacances et part visiter l'île. Prévoyante, elle a pris soin de réserver son dîner pour le soir même. Pourtant, elle ne donnera plus signe de vie à son hébergeuse qui, inquiète, décide de prévenir les gendarmes, raconte notamment le podcast "Archipels du crime", produit par InitialStudio.

Les investigations mèneront ces derniers jusqu'à la baie de Kanumera, où ils découvrent le 6 mai, sur un rocher réputé sacré, le corps de la touriste très mutilé, cible de nombreux coups et calciné jusqu'au bassin.

Une scène de crime dégradée

"Il se passe 5 jours pendant lesquels il y a un très mauvais temps. La scène de crime est épouvantable, dure à exploiter", détaille Frédéric de Greslan, l'avocat de la famille de la victime, dans un épisode de "L'heure du crime" consacré à l'affaire.

D'ailleurs, le corps est retrouvé en état de décomposition avancée, maltraité par la chaleur et l'humidité. Inconvénient lié à l'insularité, un technicien d'investigation criminelle met du temps à parvenir sur les lieux du crime. Entre-temps, des preuves ont peut-être été perdues.

Dans les croyances locales, le rocher de Kanumera est un sanctuaire, habité par des divinités et interdit aux visites sur cette île paradisiaque de Nouvelle-Calédonie. Dès lors, les enquêteurs se demandent si Mika Kusama n'aurait pas été la cible d'atroces représailles en souhaitant s'y rendre.

Les "gardiens" du rocher arrêtés

Un indice les oriente notamment vers cette piste: des pierres ont été disposées tout autour de la victime, comme dans un rite sacrificiel. Mais les locaux indiquent qu'aucun rite de cette sorte n'existe sur l'île.

Pourtant, deux membres du clan vivant sur le territoire où le rocher est situé sont arrêtés, dès le lendemain de la découverte du corps. Les suspects, Antoine et Ambroise Konhu, sont des frères considérés comme les gardiens du rocher de Kanumera. Ils sont connus de la justice pour s'en être pris par le passé à des touristes ayant outrepassé l'interdiction.

En garde à vue, les mis en cause nient les faits. Ils seront néanmoins mis en examen le 9 mai 2002.

D'autres pistes sont envisagées, notamment celle d'un coup monté de la part d'un autre clan de l'île qui, par esprit de compétition, aurait pu déposer le corps de la touriste sur ce rocher appartenant aux Konhu. On vérifie également qu'un des militaires d'une base très proche ne pourrait pas être impliqué dans le crime. Mais ces hypothèses sont moins étayées que celle d'une intervention des deux frères.

Deux procès, deux acquittements

En 2007, leur procès en première instance s'ouvre en présence de la famille de Mika Kusama, arrivés de Japon pour l'occasion. Leurs avocats dénoncent le manque de preuves et d'aveux dans le dossier. Les jurés choisissent finalement de condamner l'un des frères à 15 ans de réclusion criminelle, tandis que l'autre est acquitté.

Le condamné et le parquet font tous deux appel, entraînant un second procès en 2009. Au terme de cette nouvelle audience, les frères sont acquittés, faute de preuves assez lourdes contre eux. Un double acquittement qui laisse l'affaire non résolue à ce jour.

Chaque fois qu'un nouveau procureur est nommé à Nouméa, l'avocat de la famille de Mika Kusama, Frédéric de Greslan, tente encore de faire rouvrir le dossier. Jusqu'ici sans succès.

Elisa Fernandez