Affaire Pilarski: trois ans après, un livre redonne à Elisa sa place de victime

Le journaliste Matthias Tesson et le journaliste-écrivain Olivier Darrioumerle signent ensemble un livre qui revient sur l’affaire Elisa Pilarski, morte en forêt de Retz dans l’Aisne. Dans cet ouvrage, elle retrouve sa place de victime, parfois oubliée au moment des faits.

C’était il y a trois ans. Le 16 novembre 2019, Elisa Pilarski, une jeune femme enceinte de six mois, est retrouvée morte dans la forêt de Retz, dans l’Aisne. Sortie promener Curtis, le chien de son compagnon Christophe Ellul, elle est découverte à moitié nue, avec des traces de morsures de chiens sur le corps. Une enquête est ouverte et la question centrale devient alors: est-ce la meute de chiens de chasse à cour présente ce jour-là dans la même forêt ou Curtis qui est responsable?

L'enquête: Curtis, chien tueur ?

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Dès le départ, ce fait divers se transforme en un affrontement entre les animalistes et les défenseurs de la chasse, oubliant parfois la victime, Elisa.

“Comme souvent, les gens s’emparent d'affaires, sur les réseaux sociaux, en oubliant les principaux intéressés, c’est-à-dire, les victimes et les proches des victimes”, explique Matthias Tesson, journaliste police-justice pour BFMTV et co-auteur du livre “Un chien”.

Dans ce “roman-témoignage”, Olivier Darrioumerle, journaliste pour Sud Ouest, écrivain et co-auteur du livre, souhaite rendre hommage à la jeune femme décédée.

“Ce livre a pour but de remettre Elisa et ses proches à leurs places de victimes, leur reconstituer une histoire vraisemblable en attendant que la justice donne une vérité judiciaire”, confie-t-il à RMC Crime.

“Tout le monde l’a oublié”

Pour écrire ce livre, les auteurs ont dû convaincre les proches d’Elisa de se confier, et notamment sa mère, ce qui n’a pas été une tâche facile. “Elle ferme sa porte aux journalistes et aux réseaux sociaux, car elle est assaillie de gens qui veulent lui voler son histoire”, explique Olivier Darrioumerle. Le journaliste raconte comment les réseaux sociaux ont aidé à faire "disparaître" la victime.

“Il y a une sorte de charognards numériques qui s’attaquent à la mémoire symbolique d’Elisa. Tout le monde l’a oublié et se demande ce qu’il va arriver à Curtis”.

Pour les auteurs, le fait qu’un chien soit impliqué dans cette affaire n’est pas anodin. "Ça fait caisse de résonance, car le chien a une place privilégiée dans notre société”, avoue Olivier Darrioumerle. Matthias Tesson va même plus loin en affirmant: “le chien est l’animal préféré des Français, si cela n’avait pas été un chien, je ne pense pas que cette affaire aurait fait autant de bruit”.

La place du chien est même exacerbée, dans ce cas-là, car il est confronté à la chasse à cour.

“Au-delà d’être un chien, Curtis est devenu le symbole d’une certaine France qui déteste la chasse et devient l’étendard de la cause animale”, explique le journaliste de BFMTV.

Un livre pour “reconstruire leur histoire”

Sur les réseaux sociaux, la présomption d’innocence n’est pas toujours respectée et chacun y va de son propre jugement. “Aussi bien les défenseurs de la cause animale que les complotistes, mais aussi les propriétaires de chiens catégorisés se sont réunis dans une union des versions qui affirme que Curtis est innocent et que c’est une victime de l’homme en général”, explique l’écrivain.

Dans cette affaire où tout le monde s’est identifié à Curtis ou aux chiens de la chasse à cour, Olivier Darrioumerle veut rappeler que dans ces deux cas, on se trompe d’animaux.

“Les gens ont confondu leur animal de compagnie avec ces chiens entraînés et spécialisés".

D’après les auteurs du livre, Christophe Ellul, le compagnon d’Elisa et propriétaire de Curtis, aurait participé à faire passer son chien pour la victime d’un système. “Sur les réseaux sociaux, certains sont choqués de voir que Christophe est plus préoccupé par le sort de son chien que celui de sa femme”, relate Matthias Tesson.

“Il répète à chaque conférence de presse que Curtis est innocent, il a participé à la cagnotte pour payer un avocat à son chien, et relaye les informations en faveur de son chien’, complète le journaliste de Sud Ouest.

Aujourd’hui, Christophe est toujours mis en examen pour homicide involontaire. Son avocat a demandé des contre-expertises sur les chiens de chasse à cour. Sa version, quant à elle, n’a pas bougé et il continue d’affirmer que Curtis n’aurait pas pu tuer Elisa. De son côté, les proches d’Elisa n’attendent plus qu’une décision de justice pour tenter de se reconstruire. Ce livre, c’était avant tout pour “reconstruire leur histoire” et corriger la place de la victime qui revient à Elisa et son bébé.

Retrouvez le livre “Un chien” écrit par Matthias Tesson et Olivier Darrioumerle, aux éditions Le Cherche Midi.

Alix Mancel