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Affaires françaises

Ces personnes qui tombent amoureuses des pires criminels

Parloir où les compagnes viennent rendre visite à leurs maris criminels (image d'illustration)

Parloir où les compagnes viennent rendre visite à leurs maris criminels (image d'illustration) - FRANK PERRY / AFP

Nordahl Lelandais, Ted Bundy ou dernièrement Salah Abdeslam reçoivent des lettres d’admirateurs et d'admiratrices. Parfois, ces relations découlent sur une véritable histoire d’amour. RMC Crime a enquêté sur ce phénomène, aussi appelé l’hybristophilie.

L’été dernier, Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos du 13-Novembre, s’est marié religieusement en détention, à Fleury-Mérogis. Condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible pour son rôle dans les attentats de Paris et Saint Denis, il s’est marié avec une jeune femme, par téléphone.

Si l’homme a commis un crime et été condamné pour cela, il n’en reste pas moins attirant pour certaines femmes. Ce phénomène porte un nom: il s’agit de l’hybristophilie. Pour le professeur et psychocriminologue Philip Jaffé, ce syndrome désigne “une femme qui est attirée et séduite par des criminels et particulièrement ceux qui ont commis des crimes atroces comme des assassinats, des meurtres en série, et qui ont une certaine notoriété”.

De son côté, Michel Bénézech, professeur en psychiatrie qui a étudié pendant dix ans les comportements carcéraux, précise dans un article paru dans les Annales médico-psychologiques que “ce n’est pas le fait d’aimer quelqu’un bien qu’il soit criminel, mais de l’aimer parce qu’il est criminel”.

Trois profils

Les spécialistes qui ont étudié ce phénomène remarquent trois similitudes qui réunissent ces personnes. Pour le professeur Bénézech, elles disposent de facteurs psychologiques qui les rendent plus vulnérables à l’attraction des criminels en raison de "leur sensibilité à la souffrance, de leur désir de protection et de leur instinct maternel".

Elles ont souvent un passé difficile qui les a familiarisées avec la souffrance:

“Il y a une faille affective en elles, due à leur histoire personnelle avec d’autres compagnons ou issue de l’enfance”, explique Marine Mazéas, journaliste spécialiste des faits divers et autrice du livre L’aimé meurtrier, femmes de criminels et de voyous.

Pour le psychocriminologue, les souffrances psychologiques qu’elles ont subis jouent toujours un rôle important dans la naissance de ce processus: “Le lien avec les criminels est une forme d’attirance toxique avec laquelle elles ne risquent rien puisqu’ils sont incarcérés”.

Il y a également les sauveuses, aussi appelées “les infirmières”.

“Ces femmes ont l’impression de porter secours à ces hommes soit par altruisme, soit par idéologie”, explique Philip Jaffé pour RMC Crime.

En créant une relation avec eux, elles espèrent leur offrir une nouvelle vie, les sauver de leurs déviances et leur permettre de se réinsérer.

Et puis, il y a aussi ces femmes qui sont attirées par l’interdit et qui cherchent à enfreindre les règles qu’on leur a toujours imposées.

“Certaines y voient une manière de ‘pimenter’ leur vie. Il y a le goût du risque qui entre en jeu. C’est tâter l’interdit, on aime tous un peu le frisson et avec les nouvelles séries qui montrent un visage séduisant du tueur en série, cela contribue à l’attrait que les femmes ont pour eux”, explique le psychocriminologue.

“Ils ont une aura qui séduit les femmes”

Avec l’arrivée, dans les années 80, des séries et films qui mettent en scène des tueurs en série, le phénomène d’hybristophilie s’est accentué. “C’est d’ailleurs pour ça qu’on n’a pas défini ce fonctionnement psychologique avant les années 80. Et ça ne cesse de s’amplifier depuis l’apparition d’Internet et des plateformes de streaming qui contribuent à l’image romanesque des criminels”, ajoute Philip Jaffé.

Contrairement aux idées que l’on se fait des criminels, ils ont généralement beaucoup de succès auprès des femmes, comme nous indique Marine Mazéas.

“C’est parce qu’ils ont un peu l’image des ‘gentlemen cambrioleurs’, ils ont une aura qui séduit les femmes”.

Selon elle, les tueurs en série peuvent paraître séduisants, car ils savent charmer et manipuler l’image qu’ils projettent pour toucher les femmes les plus vulnérables.

La notoriété de ces criminels joue également un rôle dans l’attirance des femmes.

“Les célèbres criminels d’Amérique du Nord, par exemple, ont leurs propres sites internet, leurs fan-clubs, leurs admiratrices, leurs militantes, leurs prétendantes. Plus le crime est grand, plus grandes sont l’attraction voyeuriste et la curiosité qu’il entraîne”, explique le professeur Michel Bénézech.

En France, l’association "Ban Public" offrait, jusqu’en 2018, la possibilité aux criminels de poster des annonces à la recherche d’une compagne. Le tueur en série Patrice Alègre en a profité, le 1er novembre 2018 en publiant: “Recherche une compagne entre 40 et 60 ans pour relation durable”. Aux dernières nouvelles, selon les informations de l'hebdomadaure Marianne, il a trouvé l’amour dans les bras de Marie,

Retrouvez le livre L'aimé meurtrier, femmes de criminels et de voyous de Marine Mazéas, aux éditions du Rocher.

Alix Mancel