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Affaires françaises

Violences sexuelles à l'agence Elite: l'enquête pour viols contre Gérald Marie classée pour prescription

Gérald Marie, président du groupe Elite, lors d'une conférence de presse à Shangaï

Gérald Marie, président du groupe Elite, lors d'une conférence de presse à Shangaï - LIU JIN

Alors que la défense exprime du "soulagement", les plaignantes comptent cette fois porter plainte au civil.

L'enquête concernant les plaintes pour viols et agressions sexuelles déposées à l'encontre de Gérald Marie, l'ex-directeur européen de l'agence de mannequins Elite, a été classée sans suite lundi, rapporte le parquet de Paris auprès de RMC Crime, confirmant une information de l'AFP.

Si les requêtes des 15 plaignantes, parmi lesquelles l'ex-journaliste de la BBC Lisa Brinkworth, ont été rejetées, c'est que leurs accusations portent sur des faits aujourd'hui prescrits.

"Gérald Marie a été soulagé, il a eu le sentiment d'un acharnement médiatique pendant deux ans", a réagi son avocate, Céline Bekerman, contactée par RMC Crime.

"Il a toujours clamé son innocence et réfute les faits avec une grande rigueur. On a le sentiment que la justice a fait son travail."

Tous les faits sont prescrits

En 2020, une enquête avait été ouverte à l'encontre de l'ex-directeur européen d'Elite après plusieurs plaintes et signalements émanant d'anciens mannequins de l'agence. Elles rapportaient des viols et des agressions sexuelles datant de plusieurs dizaines d'années de la part de Gérald Marie.

Les faits dénoncés étant tous prescrits, la décision rendue par le parquet lundi n'a pas été une grande surprise pour les plaignantes et leurs avocats. "On espérait que des victimes plus récentes se manifestent, car elles existent sans aucun doute", avoue cependant auprès de RMC Crime Me Anne-Le Jeune, l'une de leurs conseils.

L'avocate ajoute qu'une femme dénonçant des faits non prescrits s'est d'ailleurs déjà manifestée auprès des plaignantes, mais n'a jamais voulu entamer des démarches judiciaires.

Le cas de Lisa Brinkworth en question

Reste un espoir pour les plaignantes: que le cas de Lisa Brinkworth, dont les avocats disent avoir la preuve qu'elle a été empêchée de porter plainte plus tôt, échappe à la prescription et à la clôture de l'enquête.

Auparavant journaliste à la BBC au Royaume-Uni, celle-ci s'était infiltrée dans l'agence Elite pour les besoins d'un reportage sur les abus dans le domaine du mannequinnat. Selon son témoignage, un soir d'octobre 1988, dans un restaurant à Milan, l'ex-directeur lui propose de l'argent en échange d'un rapport sexuel, puis s'assoit à califourchon sur elle en mimant des gestes à connotation sexuelle.

Lorsqu'elle annonce à sa direction qu'elle compte porter plainte, celle-ci lui aurait enjoint cependant de garder le silence pour ne pas compromettre le reportage. Plus tard, la BBC signera même un accord de confidentialité avec l'agence Elite, raconte-t-elle encore.

Si, là encore, les faits sont à présent prescrits, Me Anne-Claire Le Jeune et ses confrères tiennent à prouver au parquet que leur cliente n'a pas pu porter plainte plus tôt dans ces conditions et plaident "l'obstacle insurmontable". "Des éléments montrent qu'elle a été empêchée de dénoncer les faits. Il faut un débat autour de ça", martèle l'avocate.

La défense dénonce des infractions non caractérisées

Une nouvelle plainte a par ailleurs été déposée début janvier à ce sujet pour anticiper une clôture du dossier. "Ce n'est pas la fin pour nous. Mon dossier reste ouvert car nos avocats ont déposé une nouvelle plainte auprès du juge d'instruction, et espèrent que le juge va maintenant considérer que dans mon cas la prescription doit être interrompue", nous confie Lisa Brinkworth ce mercredi.

Quant aux autres femmes à avoir reporté des comportements déplacés de la part de Gérald Marie, elles comptent pour certaines engager des démarches au civil, avec l'espoir d'être indemnisées malgré la prescription.

Ces nouvelles démarches ne semblent pas inquiéter la défense outre-mesure: "En aucun cas, les infractions dénoncées sont caractérisées, en-dehors des témoignages des plaignantes. Or, dans la plupart des dossiers au civil, il faut que la faute ait été prouvée", déclare Me Céline Bekerman.

De son côté, Lisa Brinkworth assure qu'elle et les autres plaignantes ne comptent pas "abandonner [leur] quête de justice".

Elisa Fernandez