L'histoire vraie derrière... le film "Elephant"

Le film "Elephant" de Gus Van Sant sorti en 2003. - HBO films
Bientôt 20 ans que le jury du festival de Cannes a décidé de consacrer l'un des films les plus célèbres de Gus Van Sant. En mai 2003, Elephant raflait à la fois la Palme d'or et le prix de la mise en scène en racontant une journée dans un lycée américain perturbée par deux élèves en mal d'attention qui préparent une fusillade.
Critique sociale et politique retentissante, le long-métrage s'appuie en réalité sur un fait divers tragique survenu quatre ans plus tôt dans un lycée de Columbine, dans le Colorado aux Etats-Unis. Le 20 avril 1999, deux lycéens, Dylan Klebold et Eric Harris, font exploser une bombe aux alentours de leur établissement pour mobiliser les services de police et les secours. Pendant ce temps, ils entrent armés de pistolets, de fusils, de carabines et de couteaux à l'intérieur du lycée.
Au total, ils abattent douze de leurs camarades et un enseignant. Vingt-quatre autres personnes sont blessées mais finissent par s'en sortir. Au terme de cette fusillade, qui dure 46 minutes, les deux élèves se rendent dans la bibliothèque et retournent leur arme contre eux afin de se donner la mort.
"Spirale suicidaire"
Auprès de Paris-Match, la mère de Dylan Klebold confiait en 2016 que son fils s'était "laissé enfermer dans une spirale suicidaire". "Il avait perdu le contrôle de lui-même", déclarait-elle, ajoutant qu'il était victime de harcèlement au sein de son établissement.
Elle explique avoir découvert, après-coup, que dans son journal intime son fils faisait mention de son état "misérable" et disait être inspiré par le film Tueurs nés d'Oliver Stone, qui raconte le parcours criminel d'un couple aux Etats-Unis.
"Il a tué parce qu'il voulait mourir", poursuivait-elle auprès de nos confrères. "Je crois qu'il a souffert de harcèlement à l'école et qu'il était sous l'influence d'un ami très dérangé, dominateur et probablement psychopathe."
Une fascination pour la violence
L'ami en question, Eric Harris, a également laissé derrière lui un journal dans lequel il détaillait, étape par étape, le déroulé de la fusillade. Il y mentionnait aussi son désir de laisser une empreinte dans le monde en surpassant d'autres fusillades ou événements meurtriers connus.
Agé de 18 ans au moment de la tuerie, il faisait très souvent référence dans ses écrits aux nazis, à la violence et aux armes, comme le rapportait Libération en 2006. "Je suis une arme. Un Wildey 45 semi-automatique, je suis Dieu, je tue les gens, il y a cet homosexuel, il est arrogant et superficiel, je lui fais sauter la tête", écrivait-il.
Les deux adolescents avaient également prévu de faire exploser deux bombes au sein de la cafétaria du lycée. À cause d'un problème technique, celles-ci ne se sont finalement pas déclenchées.
Des débats sur les armes à feu
À l'époque où elle est survenue, la tuerie de Columbine était l'attaque la plus meurtrière perpétrée dans une école aux Etats-Unis. Elle marque immédiatement l'Histoire du pays, inspirant même au réalisateur Michael Moore un documentaire devenu célèbre, Bowling for Columbine.
Surtout, cet événement tragique a mis le feu aux poudres aux débats sur l'accès aux armes aux Etats-Unis et à la sécurité dans les écoles. D'autant que plusieurs autres fusillades se sont succédées dans le milieu éducatif américain: on retient par exemple la tuerie de Sandy Hook en 2012 ou celle de Parkland en 2018, qui ont fait respectivement 27 et 17 morts.
Depuis la fusillade de Columbine, les forces de police ont retravaillé leurs techniques d'intervention, largement critiquées après la longueur de l'intervention dans le lycée ce jour d'avril 1999. Par ailleurs, comme le rapporte Le Monde, de nombreuses écoles américaines ont mis en place des exercices pour se préparer à de possibles attaques.