Affaire des "violeurs de Mazan": le principal suspect aurait-il pu être interpellé dès 2010?

Un homme a été arrêté en 2020 pour avoir soumis chimiquement sa femme et l'avoir offerte à des inconnus pendant des années à Mazan, dans le Vaucluse. - Google Street View
L'instruction suit son cours et déjà se pose la question de savoir si le suspect aurait pû être interpellé plus tôt. Le septuagénaire arrêté après avoir drogué et offert sa femme à des inconnus pendant plusieurs années est également soupçonné d'avoir commis d'autres crimes depuis les années 1990. Si le suspect, Dominique P., a été arrêté en 2020, il semble qu'il aurait pu être interpellé beaucoup plus tôt.
Et pour cause: selon une information du Parisien, confirmée par l'avocate du suspect auprès de RMC Crime, les empreintes de Dominique P. avaient été enregistrées au fichier des empreintes génétiques (le FNAEG) dès 2010.
D'après nos confrères, elles avaient déjà matché avec de l'ADN prélevé dans le cadre d'un cold case datant de 1999, la tentative de viol avec arme d'une jeune femme de 19 ans à Paris. Cependant, cette information n'aurait jamais été exploitée par la justice.
"C'est stupéfiant pour tout le monde, personne ne peut s'en réjouir", commente auprès de RMC Crime Me Béatrice Zavarro, l'avocate de Dominique P. "Si la justice est passée à côté de ça, c'est désolant vis-à-vis de Madame P", l'épouse du suspect, qui aurait pu échapper aux viols si son mari avait été arrêté plus tôt.
Soupçonné dans deux cold cases
Pris la main dans le sac en 2020 en train de filmer sous les jupes de clientes dans un supermarché à Carpentras, dans le Vaucluse, le retraité est interpellé. En perquisitionnant son domicile, les enquêteurs retrouvent de très nombreuses vidéos pornographiques sur lesquelles on voit des hommes violer l'épouse du suspect, alors que celle-ci est visiblement inconsciente.
Pendant des années, le retraité a drogué sa compagne et passait des petites annonces pour proposer à des hommes qu'ils viennent profiter de sa femme. Suite à cette découverte, le suspect a été mis en examen, et 49 hommes ont été entendus, soupçonnés d'avoir abusé de la victime.
C'est le Pôle national dédié aux crimes sériels ou non élucidés de Nanterre qui a finalement établi un rapprochement ente deux cold cases parisiens et le septuagénaire: le viol suivi du meurtre d'une femme de 22 ans en 1991, et la tentative de viol en 1999. Dans ce dernier dossier, confronté à la victime, l'homme a reconnu les faits.
"Calculateur et manipulateur"
Selon l'avocate de ces deux victimes, Me Florence Rault, cette nouvelle information, si elle est avérée, est regrettable mais "ne change rien au fond du dossier". "Cela ouvre simplement la voie à des réclamations pour dysfonctionnements de la justice", explique-t-elle, contactée par RMC Crime. "Je vais faire des vérifications et voir s'il est possible de faire quelque chose", poursuit-elle.
Florence Rault espère surtout que la suite de l'instruction permettra d'aboutir à des aveux plus complets du suspect.
"Tant qu'on ne lui présente pas des preuves irréfutables, il continue de nier. Il reconnaît des faits, mais à sa sauce", précise l'avocate, qui le décrit comme un homme "calculateur et manipulateur" qui "préparait ses coups".
De son côté, l'avocate de Dominique P. Me Béatrice Zavarro se réserve le droit de prôner la prescription des faits dans le dossier de la tentative de viol en 1999. "Procéduralement, je suis toujours dans les délais pour avancer une requête", détaille l'avocat du suspect.