"La Veuve noire de l'Isère": le nouvel épisode du podcast Faites entrer l'accusé
Le vendredi 31 octobre 2008, un promeneur fait une macabre découverte, à Villard-Bonnot, près de Grenoble: une voiture brûlée dans un champ, et à l'arrière, un corps calciné. Puis dans le coffre, un deuxième cadavre, celui d’un chien. Seul un bout de la plaque d’immatriculation est encore visible. Ces derniers identifient le propriétaire de la voiture, il s’agit de Daniel Cano.
Les gendarmes décident d’investir le quartier. Lorsqu’ils retournent sur les lieux, ils se retrouvent nez à nez avec une femme. Elle dit s’appeler Manuela Cano, et explique chercher le chien de sa fille. Très loquace, cette femme commence à raconter ses mésaventures. Elle raconte s’être disputée avec son mari.
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Alors, les gendarmes décident d’aller directement à son domicile. Ils remarquent des traces de fumée dans une pièce. Manuela Cano explique qu’un mois plus tôt, un incendie s’est déclenché. Les forces de l’ordre décident donc de lui mettre la pression, et veulent la mettre en garde à vue. Mais la suspecte ne tient pas le choc, et termine à l’hôpital.
Avec un corps aussi calciné, il est difficile de connaître les origines de la mort. Malgré tout, des traces de médicaments sont retrouvées dans le sang de la victime. Une semaine après la découverte du crime, la juge reçoit la réponse du laboratoire. Les experts ont comparé l’ADN du cadavre à celui qui a été prélevé sur une brosse à dents de Daniel Cano, et les analyses confirment qu’il s’agit bien de lui.
Des coïncidences étranges entre ses conjoints
Le couple se rencontre en 1991. C’est un véritable coup de foudre entre les deux. Ils emménagent ensemble, puis se marient six ans plus tard. Elle a une fille, et lui, un garçon. Son mari est chaudronnier et Manuela Cano est monitrice d’auto-école. Cette dernière décide de monter sa propre affaire. Mais en 2004, les choses se gâtent. La gérante commet des escroqueries au permis de conduire. Pour ce délit, elle est condamnée à 80.000 euros d'amende, et revend son entreprise à l’un de ses frères.
Les gendarmes continuent de fouiller son passé, et ce qu'ils découvrent est assez troublant. Quinze ans plus tôt, elle s’appelait Manuela Gonzalez. Elle vit depuis deux ans avec Thierry Le Chevalier, mais le couple bat de l’aile. Cette dernière fréquente un amant, qui sera son futur mari. Etrange, son concubin de l’époque meurt dans un incendie, et il avait ingéré un somnifère. A l’époque, un non-lieu est prononcé, car un alibi est fourni à cette femme: c'est Daniel Cano.
Un autre dossier de 1989 vient aussi s’ajouter à sa longue liste de conjoints qui disparaissent. Elle perd son compagnon, un certain François Collazo, d’origine espagnole comme elle. Il tient un café à Brignoud, non loin de Villard-Bonnot. Et un matin, il est retrouvé mort dans son garage, le moteur de sa voiture allumé. Sa mort se conclue par un suicide. De son côté, l’autopsie révèle la présence de fortes doses de médicaments, alors qu’il n’en prenait pas.
Accro aux jeux et les dettes s'accumulent
Les gendarmes sont persuadés que Manuela Cano est liée au meurtre de son mari. Ils se rendent compte que le couple est criblé de dettes, et que cette femme est une joueuse compulsive. Son compagnon n’est pas au bout de ses peines. Il découvre avec stupéfaction que sa maison est hypothéquée.
Les forces de l'ordre poursuivent leurs investigations. Ils découvrent qu’elle a failli encaisser le jackpot. Cette femme était désignée comme la bénéficiaire de plusieurs assurances-vie, dont le montant s’élève à 234.000 euros. Le mobile financier est donc privilégié.
Même si la suspecte est rôdée pour les interrogatoires, les enquêteurs trouvent une faille dans le procès-verbal d’audition de ses parents. Le jour de la découverte du corps de la victime, le père de Manuela Cano explique aux gendarmes avoir reçu un appel sur le fixe de l’une de ses filles. Elle aurait dit “tout ce que je sais, c’est que Daniel est mort.” La mère, quant à elle, indique que c’est le premier appel de la journée, soit à 8h05. Les gendarmes vérifient, et constatent que cette soeur était en lien avec Manuela Cano entre 7 h 50 et 8 h 00. La suspecte est donc déjà au courant que son mari est mort. Pourtant, les gendarmes sont sur place devant cette voiture incendiée, et ne connaissent pas encore l’identité de la victime. C’est un faux pas de la part de Manuela Cano, qui a appelé sa famille trop tôt.
Condamnée à 30 ans de prison
Le 23 mars 2010, soit un an et demi après la mort de Daniel Cano, les gendarmes la mettent en garde à vue. Ils font monter la pression, mais cette femme ne lâche rien. Malgré tout, la juge la met en examen pour tentative d’assassinat et assassinat. Elle part à la maison d'arrêt de Chambéry. C’est le 14 avril 2014 que s’ouvre son procès devant la cour d’assises de l’Isère à Grenoble. L’accusée plaide non coupable et vise l’acquittement.
Quand le verdict tombe, elle est condamnée à 30 ans de réclusion criminelle, mais fait appel de la décision. Le 30 mai 2016, la cour d’appel de Valence confirme la même peine que la cour d’assises. Manuela Gonzalez essaie malgré tout d'autres voies: elle dépose un pourvoi devant la Cour de cassation, mais sa demande est déboutée. Dernier espoir : elle saisit la Cour européenne de justice, et c’est encore un échec.
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