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"Rien n'a permis de la retrouver": 20 ans après, la disparition de Nadine Chabert reste un mystère

(Photo d'illustration) Des dossiers de justice archivés.

(Photo d'illustration) Des dossiers de justice archivés. - LUDOVIC CAILLERE / AFP

La mère de famille s'est volatilisée dans la nuit du 10 au 11 juin 2003 dans les Bouches-du-Rhône. Vingt ans plus tard, les enquêteurs n'ont toujours pas percé le mystère de sa disparition.

"Sa fille n'a jamais eu les réponses qu'elle attendait." Les investigations menées pendant des années n'ont jamais permis à Émilie Chabert de retrouver sa mère. Nul ne sait ce qui est advenu de Nadine, jeune femme de 34 ans portée disparue à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) le 11 juin 2003.

Vingt ans de mystère émaillés de ratés judiciaires, selon Me Denis Fayolle, l'avocat de la fille de la disparue: "Ce n'est évidemment pas évident. Mais au niveau judiciaire, cet anniversaire permet aussi de rappeler que l'enquête n'a pas permis à ma cliente de retrouver sa mère."

Car s'il y a bien eu un suspect dans l'affaire, à savoir le mari de Nadine Chabert avec qui elle était en instance de divorce, rien n'a jamais prouvé son implication dans la disparition.

Le "coupable idéal"

N'ayant plus de nouvelles de sa salariée, le patron de Nadine Chabert donne l'alerte le 11 juin 2003: celle-ci était censée se rendre à une formation à Paris mais ne s'y est pas présentée. Rapidement, l'enquête se dirige vers Patrick Chabert, son mari, qui est l'une des dernières personnes à l'avoir vue. La veille, il l'a en effet déposée au niveau d'un rond-point de Fos-sur-Mer où un collègue devait la récupérer en voiture.

Le couple étant en instance de divorce, les autorités s'intéressent alors à la piste d'une séparation mal acceptée par l'homme. Un détail fait basculer l'enquête: alors que Patrick Chabert avait initialement indiqué avoir appelé sa compagne le 11 juin tôt depuis son domicile, l'étude de sa téléphonie révèle que cet appel a été passé depuis un hôtel à Toulon, rappelle un épisode de L'heure du crime.

"L’enquête s'est focalisée sur le coupable idéal: le mari en instance de divorce, la dernière personne à avoir vu Nadine Chabert... Émilie avait perçu l'évolution du couple. Pour elle, il était inconcevable d'imaginer" que son père ait quelque chose à voir avec la disparition de sa mère, raconte Me Denis Fayolle.

Malgré les dénégations du suspect et de son entourage, celui-ci est condamné en première instance à 20 ans de réclusion criminelle pour "assassinat". Il sera finalement été acquitté en 2011 après avoir fait appel de sa condamnation.

Une piste inexplorée

Ce qui interpelle d'autant plus les proches de Nadine Chabert, c'est qu'une piste concrète n'a jamais été explorée: quelque temps avant de se volatiliser, la jeune femme s'était intéressée de manière appuyée à l'ésotérisme.

"L'hypothèse sectaire a totalement été négligée", regrette l'avocat.

À l'époque des faits, Émilie Chabert n'avait que 12 ans. Mais même elle avait perçu une évolution dans le comportement de sa mère, en lien avec ces nouvelles croyances. "Elle avait retrouvé un tas d’éléments intéressants et inquiétants, totalement négligés par les enquêteurs. Il est bizarre que la justice ne se soit pas intéressée à ses nouvelles rencontres et pratiques ésotériques."

L'envie de "tourner la page"

Après s'être débattues pour que les investigations reprennent, la fille et la mère de la disparue obtiennent une réouverture de l'enquête. "Mais plus de 12 ans s’étaient écoulés depuis la disparition de Nadine Chabert, et les éléments de preuves beaucoup plus difficiles à obtenir", poursuit Me Denis Fayolle.

Alors qu'un Pôle national dédié aux crimes sériels et non élucidés a vu le jour l'an dernier à Nanterre, Émilie Chabert et son avocat n'ont cependant pas souhaité entreprendre de nouvelles démarches pour soumettre le dossier, portés par un sentiment de déception et l'intention de passer à autre chose.

"L’instruction n’a pas franchement réconcilié celle que je défends avec l’institution judiciaire. Aujourd'hui, elle aspire à vivre, à tourner la page avec l’institution judiciaire. Même si sa mère reste évidemment dans sa tête."

Elisa Fernandez